Vendredi 18 juillet 2025
Nous quittons Bruxelles en début d’après-midi, direction la Normandie. Le temps est au beau fixe, et la route se déroule sans encombre. En approchant d’Étretat, la météo change légèrement : une fine brume recouvre la mer et les falaises, donnant à notre arrivée une atmosphère à la fois douce et mystérieuse. Peu à peu, les contours caractéristiques de la Côte d’Albâtre émergent à travers les nuées. Le paysage se dévoile par étapes, comme une scène qui se met en place.
Nous arrivons à l’hôtel Dormy House en fin de journée. Situé sur les hauteurs du village, cet établissement historique, fondé au début du XXe siècle, offre une vue spectaculaire sur la mer et les falaises. Nous sommes logés dans la Villa, un bâtiment à part, niché dans un jardin paisible. La chambre est spacieuse, lumineuse et confortable, avec une atmosphère discrètement élégante. Le cadre invite immédiatement à la détente.
Une fois installés, nous partons pour une première découverte du site. Nous descendons à pied jusqu’à la plage, couverte de galets arrondis et encore tièdes de la journée. De là, nous longeons le front de mer avant d’entamer la montée vers la falaise d’Amont. Le sentier grimpe doucement à travers la verdure, offrant peu à peu une vue de plus en plus saisissante sur la côte et les arches naturelles.
Au sommet, nous faisons halte à la chapelle Notre-Dame de la Garde, qui veille sur les marins depuis 1856. Construite en style néogothique, elle remplace une première chapelle du XVIIe siècle disparue. Ce petit édifice de pierre, surplombant la Manche, dégage une sérénité particulière. Autour, la vue est panoramique : à nos pieds, les toits gris du village, à l’ouest, la célèbre aiguille creuse, et tout autour, l’horizon qui semble ne jamais finir.
Nous restons un moment à profiter du paysage, puis redescendons vers le centre d’Étretat pour le dîner. Nous avons réservé une table à l’Huîtrière, un restaurant situé à quelques pas de la plage. Depuis la baie vitrée, nous profitons d’une belle vue sur la mer. Nous choisissons le menu de la pêche, et la raie, servie avec une sauce légèrement citronnée et des légumes de saison, se révèle particulièrement savoureuse. Le service est attentionné, et l’ambiance détendue conclut agréablement cette première journée.
De retour à l’hôtel, la nuit tombe lentement sur les falaises. Le calme s’installe, ponctué seulement par le ressac discret de la mer au loin. La journée a été riche en découvertes, et donne le ton pour la suite du voyage.
Samedi 19 juillet 2025
La journée commence tranquillement par un petit déjeuner buffet au Dormy House. Installés dans la salle à manger baignée de lumière, nous profitons d’un large choix de produits frais : viennoiseries, fruits, fromages, œufs brouillés… Le moment est calme et agréable, idéal pour entamer une nouvelle journée de découverte.
Nous partons ensuite pour une dernière balade le long des falaises. Depuis le pied de l’Aiguille creuse, formation emblématique d’Étretat immortalisée par Maurice Leblanc, nous empruntons le sentier côtier en direction de la vallée d’Antifer. Le chemin offre des panoramas saisissants sur les arches naturelles, les falaises abruptes et l’immensité de la mer. Le vent souffle fort par moments, mais l’air est pur et vivifiant. La marche est ponctuée de haltes pour admirer les paysages, observer les oiseaux marins et contempler la côte découpée.
En fin de matinée, nous redescendons vers le village d’Étretat, que nous prenons le temps de parcourir à pied. Les ruelles pavées, les maisons à colombages et les petites boutiques de souvenirs créent une ambiance conviviale. Nous nous attardons devant quelques galeries d’art avant de rejoindre l’hôtel.
Aux alentours de midi, nous prenons la route en direction de Trans‑la‑Forêt, petit village situé à une vingtaine de minutes du Mont‑Saint‑Michel. Le trajet traverse la campagne normande, paisible et verdoyante. Nous arrivons dans l’après-midi au gîte Le Clos Saint Michel, une belle maison d’hôtes tenue par Nathalie, notre hôtesse. Son accueil est chaleureux et attentionné. Elle nous installe dans une grande chambre confortable et soigneusement décorée, dans les combles.
En début de soirée, nous repartons vers le Mont‑Saint‑Michel, où nous avons réservé une table à la Ferme Saint‑Michel, un restaurant situé à proximité du barrage. Le cadre est simple, l’accueil professionnel, et nous optons pour le menu classique. Le dîner est bon, sans fioritures, et constitue une agréable transition avant la suite de la soirée.
Vers 20 h, nous entamons la traversée à pied de la passerelle pour rejoindre le Mont. Le ciel est changeant : nuages, éclaircies, quelques gouttes de pluie. La météo est incertaine mais ajoute une touche dramatique au décor. À mesure que nous approchons, les remparts se dressent dans la pénombre et l’ambiance devient plus silencieuse.
Le Mont-Saint-Michel, dressé sur un îlot rocheux au cœur d’une baie soumise aux plus grandes marées d’Europe, est un site exceptionnel à bien des égards. Classé au patrimoine mondial de l’UNESCO, il incarne à la fois un haut lieu spirituel, un exploit architectural et un paysage naturel spectaculaire. L’origine du sanctuaire remonte au VIIIe siècle, lorsque l’évêque Aubert d’Avranches, selon la légende, reçut en songe l’ordre de l’archange Michel d’élever un sanctuaire sur le mont. Ce petit oratoire primitif deviendra, au fil des siècles, une abbaye majeure, puis un chef-d’œuvre du gothique.
La construction en étages de l’ensemble monastique, au sommet du rocher, n’est pas seulement une prouesse technique : elle symbolise une ascension spirituelle. En gravissant les ruelles jusqu’à l’abbaye, on passe littéralement du monde des hommes vers celui du divin. Pendant près d’un millénaire, des moines bénédictins ont vécu ici, avant que le Mont ne soit transformé en prison à la Révolution. Ce n’est qu’au XIXe siècle que débute sa restauration, jusqu’à devenir le lieu de mémoire et de visite que l’on connaît aujourd’hui.
Une fois à l’intérieur, nous déambulons dans les ruelles médiévales du Mont, désormais désertées par la foule de la journée. Le calme et la lumière tamisée créent une atmosphère très particulière. À 21 h 40, nous rejoignons l’entrée de l’abbaye pour assister au spectacle nocturne “Rêve de lune”.
Ce parcours immersif invite à redécouvrir l’abbaye sous un autre angle, à travers un jeu de lumières, de projections et d’ambiances sonores. La déambulation traverse les salles emblématiques du monument – salle des hôtes, cloître, crypte, réfectoire – magnifiées par une mise en scène sobre et poétique. La lumière de la lune, réelle ou simulée, guide les visiteurs, tandis que la musique épouse les voûtes et les murs centenaires. La scénographie évoque les rêves, les marées et la spiritualité du lieu, sans imposer de narration : chacun construit sa propre expérience, au fil des espaces traversés.
Le résultat est magique. Le silence des lieux, les contrastes d’ombres et de lumières, et la majesté architecturale de l’abbaye plongée dans la nuit créent une expérience unique, hors du temps. Nous ressortons vers 22 h 45, encore sous le charme.
Nous prenons ensuite la navette retour vers le parking, puis regagnons tranquillement notre gîte, encore marqués par la beauté de cette soirée au Mont.
Dimanche 20 juillet 2025
Nous nous levons tôt, sous un ciel encore hésitant entre nuages et éclaircies. Le petit déjeuner est servi à la table d’hôtes du Clos Saint Michel. Nous retrouvons la grande table commune, garnie de produits maison : confitures, pain frais, fromages locaux, œufs sur demande. L’ambiance est conviviale et détendue, fidèle à l’accueil chaleureux que nous réserve Nathalie depuis notre arrivée. Une journée bien remplie s’annonce, et ce petit moment de calme en est une agréable introduction.
Vers 9h, nous partons à nouveau vers le Mont‑Saint‑Michel, reprenant la passerelle de la veille. Le chemin, encadré par les prés salés, est paisible. La météo typiquement normande alterne entre éclaircies et courtes averses rafraîchissantes, tout comme la veille.
Sur l’île, nous démarrons une visite guidée de l’abbaye. La guide, passionnée, nous explique en détail les fonctions des différents espaces médiévaux : la salle des hôtes, le cloître, le réfectoire, la salle des gros piliers… Nous revisitions les lieux découverts la veille avec “Rêve de lune”, mais cette fois leur dimension spirituelle et historique est mise en lumière. Le matin révèle la pierre dans sa texture vraie, les vitraux dans leur lumière naturelle, et l’ambiance est plus vivante, moins onirique, mais tout aussi impressionnante.
La météo renoue avec ses variations : un rayon de soleil éclaire une cour, puis une pluie légère nous pousse sous un auvent. Cela ajoute du caractère à notre visite, renforçant l’impression d’un site vivant, respectueux des éléments.
Lorsque la visite se termine à la mi-journée, nous reprenons les ruelles pour un déjeuner rapide dans une gargotte locale. C’est l’option pratique : bien que le prix soit élevé pour ce que c’est, la qualité ne suit pas toujours, mais l’endroit est touristique et très fréquenté. Nous nous contentons de gallettes, tout en profitant d’un petit moment assis pour observer les visiteurs.
Reboostés, nous reprenons la route vers Cancale, en passant par la Chapelle Sainte-Anne, nichée sur une petite colline en bord de route. Ce modeste édifice du XVIIIe siècle, en granit local, offre un joli point de vue sur la baie. En arrivant au parking attenant, nous découvrons un méchoui organisé par la collectivité locale : un groupe grille des brochettes d’agneau dans une ambiance chaleureuse et festive, invitant les passants à se joindre à eux.
Peu après, nous atteignons Cancale, petit port de pêche renommé pour ses huîtres. Le village, aux eaux turquoise, offre une perspective différente du Mont, qu’on distingue au loin, posé comme un gardien dans la brume marine. Les ruelles sont bordées de restaurants spécialisés, d’échoppes ostréicoles et de galeries d’art.
L’étape suivante nous conduit à la Pointe du Grouin, un superbe promontoire sauvage. Les vagues s’y brisent avec force sur les falaises ; l’air marin est vif, salin et pur. Du belvédère, la vue s’étend vers les bancs de sable, les falaises et l’Atlantique à perte de vue. Nous restons là un moment, appréciant le contraste saisissant entre terre et mer.
Nous redescendons ensuite vers Saint-Malo, en empruntant la route côtière. Nous arrivons en début de soirée, sous une petite pluie… mais le ciel se déchire juste à temps pour illuminer les remparts. Nous nous engageons dans une promenade intra-muros, foulant les vieilles pierres des ruelles, entre maisons à pans de bois, boutiques traditionnelles et cafés animés. L’ambiance est chic et populaire à la fois.
Nous dînons au Corps de Garde, une crêperie située sous les remparts. Nous savourons des galettes bretonnes généreuses. Le repas est chaleureux, le service attentif. Alors que nous sortons, le soleil revenu éclaire le Port de Saint-Malo, ses yachts, et les façades anciennes.
Lundi 21 juillet 2025
Après un dernier petit déjeuner à la table d’hôtes du Clos Saint Michel, toujours aussi généreux et chaleureux, nous quittons le gîte et prenons la direction de Dol-de-Bretagne, dernière étape de notre voyage avant le retour. La route est paisible, bordée de haies et de champs sous une lumière changeante.
Arrivés à Dol, nous nous arrêtons pour visiter la cathédrale Saint-Samson, impressionnant édifice gothique dont les premières pierres furent posées au XIIᵉ siècle. Jadis siège d’un archevêché, la cathédrale s’élève fièrement au cœur de la ville. L’intérieur, vaste et sobre, impressionne par la hauteur de sa nef, la pureté de ses lignes et la beauté de ses vitraux. Nous prenons le temps d’observer les chapelles latérales, le chœur voûté, et le puits intérieur qui reflète celui situé à l’extérieur, dans une belle mise en scène de lumière et de silence. L’atmosphère du lieu invite à la pause.
À quelques kilomètres de là, nous faisons un arrêt au menhir du Champ-Dolent. Dressé en pleine campagne, cet impressionnant bloc de granit de plus de neuf mètres de haut semble sortir de la terre comme une veine de légende. Plusieurs histoires circulent à son sujet : certains disent qu’il serait tombé du ciel pour séparer deux frères en conflit, d’autres qu’il aurait été lancé par Satan en colère contre la construction de la cathédrale. On murmure même qu’il s’enfonce lentement dans le sol et qu’il marquera la fin des temps le jour où il aura complètement disparu.
Après cette dernière parenthèse mystique, nous reprenons la route vers la Belgique. Le trajet est long, ponctué de quelques embouteillages et d’averses éparses, fidèles à la météo normande et bretonne qui nous a accompagnés tout au long du séjour. Peu à peu, les paysages côtiers laissent place aux plaines plus familières du nord de la France. Le week-end s’achève, riche de découvertes, de lumière, d’histoire, et de moments suspendus.